Garderie Anode Magique

Par Roxanne Jalbert

Au cours des dernières semaines, le mot clic #maplaceautravail a été partagé des milliers de fois en lien avec le mouvement de mobilisation en réponse à la pénurie de places en garderie au Québec.

La pénurie de places en garderie est telle que plusieurs parents inscrivent leur enfant sur le guichet unique d’accès aux services de garde appelé La Place 0-5 avant même de faire la grande annonce à leur famille, mais ne réussissent pas à avoir une place.

L’impact de ce manque de place en garderie se fait sentir partout puisque de nombreux parents ne sont pas en mesure de retourner sur le marché du travail à la fin de leur congé parental. Le revenu total moyen des particuliers en 2019 à Rouyn-Noranda était de 65 391 $ pour les hommes alors qu’il n’était que de 39 265 $ pour les femmes. Étant donné que c’est souvent la personne qui a le plus petit revenu qui est contrainte de rester à la maison pour s’occuper de l’enfant s’il n’y a pas de place en garderie, cela a un impact considérable sur les femmes1.

La situation des garderies en Abitibi-Témiscamingue et à Rouyn-Noranda
En date du 31 décembre 2019, seulement 82 % des besoins de places en garderie étaient couverts pour Rouyn-Noranda2.

635 places ont été ajoutées en Abitibi-Témiscamingue au cours des 10 dernières années. Cependant, seulement 8 places ont été créées entre mars 2017 et décembre 2020. Au nombre de places existantes, 212 places ayant été octroyées dans des appels d’offres en 2011 et 2019 seraient en voie d’être ouvertes2.

Parmi ces places, on peut compter 42 places dans une nouvelle installation du CPE Fleur et Miel. Il est espéré que ces places seront disponibles en septembre prochain, et ce, plus de 10 ans après le début du processus. Un appel d’offres pour 508 places dans la région dont 168 places à Rouyn-Noranda a été publié en octobre 2020. À la suite de l’attribution des places, les CPE auront un délai de 24 mois pour ouvrir les places.

La solution au manque de places en garderie ne dépend pas seulement de la création de nouvelles places par le gouvernement. Encore faut-il qu’il y ait des éducatrices pour prendre soin des enfants. Le milieu de la petite enfance est lui aussi aux prises avec une pénurie de main-d’œuvre. Selon le site du ministère de la Famille, en 2019-2020, une éducatrice qualifiée ayant un diplôme d’études collégiales en éducation à l’enfance ou l’équivalent gagnait 18,98 $ à l’échelon 1 et jusqu’à 25,15 $ à l’échelon 10 versus 16,75 $ et 22,18 $ pour une éducatrice non qualifiée3. Considérant que plusieurs emplois sans besoin de qualification offrent des salaires supérieurs à ceux offerts aux éducatrices, le recrutement et la rétention du personnel sont difficiles.

Et qu’en est-il à Évain plus précisément ?
Le quartier Évain compte sur une installation du CPE l’Anode Magique qui a été construite en 2007. Elle y accueille actuellement 47 enfants, dont 5 places pour poupons (moins de 18 mois). Comme les parents ne peuvent sélectionner spécifiquement l’installation d’Évain, il n’est pas possible de savoir pour cette installation le nombre d’enfants sur la liste d’attente de La Place 0-5. Au moment où madame Lynda Taddio, directrice générale de l’Anode Magique, a consulté la liste pour les besoins de cet article, il y avait 612 enfants en attente pour son CPE alors que les 3 installations accueillent un total de 161 enfants. 

Les groupes pour septembre sont déjà comblés. Dans la liste de priorité du CPE, la fratrie et les enfants des employés sont privilégiés. Avec seulement 5 places poupons, il va sans dire que les places sont comblées par ces 2 groupes prioritaires. Ayant au total 35 places poupons, madame Taddio mentionne qu’il arrive que des parents acceptent une place dans une autre installation en attendant qu’une place se libère dans l’installation d’Évain.

L’Anode Magique vit elle aussi la pénurie de main-d’œuvre. Même si les employés ont priorité pour les places en garderie, il arrive qu’il n’y ait pas de place disponible au moment de l’embauche. Comme ces employés potentiels ont besoin d’une place pour leur enfant pour être en mesure de travailler, cela complique le recrutement.

Selon madame Taddio, plusieurs places en milieu familial ont fermé dans les derniers mois. Le manque de place se fait sentir au quotidien. Le CPE reçoit quotidiennement des appels de parents désespérés à la recherche d’une place pour leur enfant. Il reçoit également des lettres de présentations avec des photos de familles de parents qui espèrent trouver une place pour leur enfant.

La problématique des places en garderie et de main-d’œuvre est interreliée, la rémunération insuffisante et le manque de valorisation de la profession d’éducatrice font en sorte qu’il manque d’éducatrices. Sans éducatrice, il n’est pas possible d’avoir de places en garderie. Sans place en garderie, les parents ne peuvent retourner au travail et contribuer à la société. Il est évident que des mesures doivent être mises en place pour la valorisation de la profession d’éducatrice à la petite enfance ainsi que pour l’ouverture de nouvelles places. C’est toute la société qui pourra en bénéficier.

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Sources :
1. Observatoire de l’Abitibi-Témiscamingue, Revenu total moyen des particuliers en $ selon le sexe, MRC de l’Abitibi-Témiscamingue, 2015  à 2019
2. Observatoire de l’Abitibi-Témiscamingue, Famille et enfance — Entre de bonnes mains
3.Ministère de la Famille du Gouvernement du Québec, Taux et échelles de salaires du personnel de garde

 

Article paru dans le journal Ensemble pour bâtir, juin 2021.
Crédit photo : Diane Gaudet Bergeron.

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